Résumé
1 La fin du cycle de hausse des taux directeurs est proche. Les taux directeurs réels (excluant l’inflation) sont restrictifs, les conditions d’accès au crédit se sont durcies et la liquidité est amenée à se tarir. Nous pensons que la Fed va maintenir ses taux jusqu’à la fin de l’année et les baissera au T1 2024. La BCE devrait procéder à une dernière hausse en juin pour porter le taux de dépôt à 3,5%, puis faire une longue pause avant une baisse vers l’été 2024.
2. Nous anticipons une évolution des rendements obligataires à long terme en deux phases : d’abord un rebond modéré car l’économie montre des signes de résilience, puis une baisse en lien avec le ralentissement à venir. Nous sommes Neutre sur les obligations d’État allemandes et américaines pour le moment. Le prochain grand mouvement sera donc la baisse des taux et la repentification des courbes de rendement (baisse des rendements plus marquée sur la partie courte que la partie longue). Nos objectifs pour les rendements obligataires à 10 ans sont à 3,5% aux États-Unis et 2,5% en Allemagne dans 12 mois.
3. Obligations souveraines italiennes : nous maintenons une vue Neutre sur les obligations souveraines italiennes. Le rendement moyen est élevé (3,8% au 6 juin), mais le spread à 10 ans avec l’Allemagne devrait s’écarter modérément dans les prochains trimestres et pourrait atteindre 200 points de base dans 1 an.
4 Opportunités dans les obligations : nous sommes Positif sur les obligations d'entreprises investment grade européennes et américaines avec une duration courte. Nous sommes également Positif sur les obligations émergentes, en devise forte et en devise locale.
Banques centrales
Une pause pour la Fed, pas encore pour la BCE
Banque centrale européenne (BCE)
Trois piliers pour anticiper la politique monétaire de la BCE :
1/ les perspectives d’inflation : les salaires négociés ont fortement augmenté car ils ont tendance à suivre l’évolution de l’inflation avec un décalage de trois mois. La BCE pourrait craindre l’inflation salariale. A l’inverse, elle pourrait mettre l’accent sur les indicateurs de l’activité économique dont toutes les composantes pointent vers une baisse de l’inflation. Doit-on regarder vers l’avant ou dans le rétroviseur ?
2/ la dynamique d’inflation : l’inflation sous-jacente des services reste trop élevée du fait d’une part importante d’éléments volatils (prix des hôtels et des transports notamment).
3/ la transmission de la politique monétaire : elle fonctionne bien. Toutes les hausses de taux de la BCE sont rapidement répercutées sur l’économie réelle.
Notre avis : nous attendons une dernière hausse de taux de 0,25% en juin, qui portera le taux de dépôt à 3,5%.
Réserve fédérale américaine (Fed)
L’inflation baisse presque partout : seule l’inflation sous-jacente PCE (Personal Consumption Expenditures) ne montre pas encore suffisamment de signe de décélération. Or, c’est la mesure d’inflation préférée de la Fed. Nos projections suggèrent une baisse plus significative à partir d’août.
Le temps joue en faveur de la Fed : l’économie est appelée à ralentir maintenant que les taux directeurs réels (excluant l’inflation) sont restrictifs. En plus, les banques commerciales durcissent les conditions d’accès au crédit. A cela, s’ajoute le Quantitative Tightening en cours et un montant colossal de nouvelles émissions de billets du Trésor (T-bills) à venir maintenant qu’un accord a été signé sur le plafonnement de la dette. Ces mesures contribuent à réduire la liquidité.
Notre avis : tous les éléments sont en place pour réduire l’activité et l’inflation, la Fed ne devrait pas avoir besoin d’en faire plus. Nous privilégions le scénario de la pause (pas de nouvelles hausses de taux) jusqu’à la fin de l’année. Nous anticipons des baisses de taux à partir du T1 2024.
Conclusion en matière d'investissement
Dans le débat « hike/skip/pause » actuel, nous sommes dans le camp « pause » : nous n’attendons plus de hausses de taux directeurs aux États-Unis. Le marché penche plutôt pour le « skip » : pas de hausses en juin et une dernière hausse en juillet. L’inflation et les conditions de crédit seront déterminantes pour trancher entre les trois options. Nous anticipons des baisses de taux à partir du T1 2024. Du côté de la BCE, la fin du cycle de hausse de taux est proche selon nous. Nous attendons une dernière hausse de taux de 25 pb en juin (taux de dépôt à 3,50% alors), puis une longue pause, avec des baisses de taux vers l’été 2024.
Rendements obligataires
Deux phases
Taux américains : le rendement des billets du Trésor à 1 mois s’est effondré suite à l’accord trouvé sur le plafond de la dette, passant de 6% à 5,3%.
Évolution récente : la progression des rendements à long terme a été stoppée après la publication de chiffres meilleurs que prévu sur la décrue de l’inflation en zone euro et de mauvaises statistiques économiques en Chine. Les rendements à long terme pourraient se tendre encore un peu car l’économie américaine est résiliente et l’inflation pourrait décevoir à nouveau en zone euro le mois prochain.
Nous conservons notre scénario à deux temps :
1/ À court terme, nous restons Neutre sur les obligations américaines et allemandes à long terme car les taux à long terme devraient se tendre modérément.
2/ Ensuite, les taux à long terme devraient se détendre au fur et à mesure que l’économie américaine montre des signes de récession tangibles et que la Fed change de discours. Nos objectifs pour les rendements obligataires à 10 ans sont à 3,5% aux États-Unis et 2,5% en Allemagne dans 12 mois.
Thème du mois
Obligations souveraines italiennes
L’économie italienne se porte mieux. Le PIB était en légère contraction au T4 2022 (-0,1%) du fait de la crise énergétique. Il a ensuite rebondi plus que prévu au T1 2023 (+0,6%). Les indicateurs d’activité suggèrent une croissance économique plus forte que la moyenne des pays de la zone euro pour les prochains trimestres. La lourde dette publique italienne s’est aussi améliorée, passant de 149,9% du PIB en 2021 à 144,7% en 2022. Cette tendance devrait continuer au cours des prochains trimestres grâce à la croissance nominale élevée et les efforts budgétaires en place.
Reconnaissance : les agences de notation saluent cette reprise et Moody’s n’a finalement pas dégradé la note souveraine italienne (maintien du Baa3, juste un cran au-dessus de la catégorie high yield, avec une perspective négative probablement liée à certains doutes sur l’allocation des fonds européens du programme Next Generation EU et aux conséquences du resserrement monétaire de la BCE). Les autres agences principales de notation sont plus optimistes, avec des notes mieux ancrées dans la catégorie investment grade, assorties d’une perspective stable.
Valorisation : le spread (l’écart entre le rendement de l’obligation italienne à 10 ans et l’obligation allemande à 10 ans) s’est considérablement réduit grâce à l’amélioration économique, le recul de l’inflation et un certain engouement de la part des investisseurs pour les rendements élevés qu’offrent les obligations souveraines italiennes (3,8% en moyenne au 6 juin).
Perspectives : même si les agences de notation maintiennent leurs notes, le spread italien risque de s’élargir dans la deuxième partie de l’année. Le ralentissement économique en zone euro et aux États-Unis pourrait inciter les investisseurs à réduire leur exposition aux actifs à risque comme la dette italienne, sans discernement. De plus, les nouvelles émissions devraient être nombreuses en zone euro, surtout au mois de juin, dans un contexte où la BCE réduira encore ses achats d’obligations (fin des réinvestissements des obligations du portefeuille Asset Purchase Programme qui tombent à échéance à partir du mois de juillet). Le spread italien à 10 ans pourrait atteindre les 200 points de base d’ici un an.
Nous maintenons une vue Neutre sur les obligations souveraines italiennes.
Conclusion en matière d'investissement
Nous maintenons une vue Neutre sur les obligations souveraines italiennes. Le rendement moyen est élevé (3,8% au 6 juin), mais le spread à 10 ans avec l’Allemagne devrait s’écarter modérément dans les prochains trimestres et pourrait atteindre 200 points de base dans 1 an.
Cet article a été réalisé par notre réseau international BNP Paribas Wealth Management.