Interview de Roger Keller, responsable stratégie d’investissement, BNP Paribas Wealth Management.
Quels sont les éléments qui font de la sécurité un thème d’investissement ?
Roger Keller : Il y en a plusieurs, qui portent à la fois sur la sécurité et le sentiment de sécurité. Le premier est le besoin d’assurer la sécurité des biens et des personnes. En la matière, des entreprises leaders au plan mondial développent des solutions de prédiction, reposant à la fois sur des outils de reconnaissance faciale et des algorithmes. Il s’agit d’être en mesure d’anticiper les jours et les heures où les risques sont accrus afin d’aider les services de sécurité pour y faire face. Il y a d’ailleurs une forte demande sociale en la matière. La sécurité passe également par les contrôles de qualité s’appliquant à tous les produits. Mais la demande la plus forte est incontestablement en matière informatique. Le risque cyber figure d’ailleurs parmi le top 3 du Forum économique mondial.
Comment se modélise le marché de la sécurité informatique ?
R. K. : C’est un marché en croissance assez rapide, avec des dépenses qui augmentent de 9 à 10 % par an, selon le Gartner Group en 2018. Elles s’élevaient alors à 93 milliards de dollars et devraient atteindre 120 milliards en 2021. On parle aujourd’hui d’un ensemble de 330 sociétés, représentant une capitalisation de 3 300 milliards de dollars, couvrant trois domaines principaux : la prévention, la détection et l’élimination des cyber attaques. Selon Norton Cybersecurity Insights, en 2017, 978 millions d’utilisateurs en ont subi une. De plus, il faut mettre cela en perspective avec le développement des objets connectés. D’ici 2020, près de 50 milliards devraient être actifs, augmentant de facto la vulnérabilité des systèmes informatiques. Les services financiers sont les cibles principales des hackers. Mais tous les secteurs sont concernés. Rares sont les aspects de notre vie qui ne sont pas connectés.
Ces marchés sont-ils dominés par certains acteurs ?
R. K. : Les Etats-Unis, clairement, et l’Europe est loin derrière, avec quelques exceptions néanmoins. Pour le moment, nous assistons à une multiplication des acteurs car les domaines de la sécurité sont relativement vastes. Il y a les antivirus, la récupération des données après des attaques, la sécurité spécifique aux clouds, le chiffrement, la sécurité des systèmes de communication, le filtrage du web… C’est un univers atomisé qui, tôt ou tard, se rationnalisera. Cela veut dire aussi que pour investir dans ce domaine, il est important de prévilégier des spécialistes, qui diversifient leurs investissements, car certaines technologies seront dépassées rapidement car la concurrence est rude. La blockchain fait partie des thèmes à ne pas oublier. De très nombreuses recherches sont en cours afin d’élaborer des applications concrètes et commercialisables. Mais il faudra encore du temps pour y parvenir.
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