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Pour faire baisser les prix du pétrole, Trump doit agir peu et rester patient

BNP Paribas - Portail des études économiques
Publié le 07 février 2025 - Mis à jour le 07 février 2025
Temps de lecture : 5 minutes

La politique énergétique a été au centre de l’agenda de la campagne électorale de Donald Trump et de ses premières semaines à la Maison Blanche. Le nouveau président a pour objectif de confirmer la domination américaine sur le marché mondial des hydrocarbures (les États-Unis sont le premier producteur mondial de pétrole depuis 2019) et d’assurer un prix bas pour le consommateur américain. Cela se traduit concrètement par la volonté d’augmenter la production américaine d’hydrocarbures de trois millions de barils équivalent-pétrole par jour (mb/j), pour une production moyenne de pétrole brut de plus de 13 mb/j en 2024. Mais cet objectif est-il réaliste ?

Deux éléments clés sont à prendre en compte : tout d’abord, et contrairement aux producteurs membres de l’OPEP, les pétroliers américains sont des entreprises privées qui doivent rémunérer leurs actionnaires et, par ailleurs, le prix du baril, à partir duquel l’exploration de nouveaux champs est rentable, est assez élevé (environ 65 USD/b). Dans ce contexte, il existe une contradiction évidente entre inciter des entreprises privées à investir et le risque de détériorer leur rentabilité. Les leviers du gouvernement sont donc avant tout réglementaires, avec un impact au mieux à moyen terme (développer le réseau de pipelines, ouvrir l’accès au forage à de nouvelles terres fédérales) ou relativement marginal économiquement (réduire les redevances payées par les producteurs afin d’améliorer le seuil de rentabilité).

Un autre levier, qui dépend cette fois-ci directement de la présidence, serait de puiser dans les stocks stratégiques de pétrole états-uniens (Strategic Petroleum Reserves). Même si leur niveau actuel dépasse le minimum réglementaire (90 jours d’importations nettes de pétrole), ces réserves sont à un plus bas depuis une quarantaine d’années. Elles ont fortement baissé en 2022 afin de faire face à la hausse des prix consécutive au déclenchement de la guerre en Ukraine. Or, les États-Unis sont actuellement dans une phase de reconstitution de ces réserves, et le candidat Trump s’était engagé à poursuivre cette politique durant sa campagne.

De manière plus indirecte et d’après ses récentes déclarations, Trump pourrait faire pression sur l’OPEP afin que le cartel mette davantage de pétrole sur le marché. C’est bien sûr l’Arabie Saoudite qui est ici concernée en premier lieu car ce pays producteur détient les plus importantes capacités de production inutilisées. À court terme, cette possibilité semble peu probable, à moins qu’elle s’insère dans une négociation économico-géopolitique plus large, dans le cadre de la recomposition des équilibres régionaux. D’un point de vue économique, l’Arabie Saoudite n’a aucun intérêt à une réduction des prix même pour gagner des parts de marché. En effet, le royaume fait face à des besoins financiers importants, dans le cadre de son plan de transformation économique, et le niveau actuel des prix du pétrole ne permet pas de les financer. En 2025, le gouvernement saoudien n’équilibrera son budget qu’avec un prix du baril supérieur à 90 USD.

En prenant un peu de hauteur, au regard des perspectives du marché pétrolier mondial en 2025, on serait tenté de dire que le meilleur moyen pour Trump de faire baisser le prix du baril est de ne pas agir car le marché s’en chargera. Dans notre scénario central, le prix du baril est en effet orienté à la baisse : la demande devrait modérément progresser, toujours pénalisée par le ralentissement chinois, tandis que les producteurs non-membres de l’OPEP+ continueront d’augmenter leur production, ne permettant pas aux producteurs de l’OPEP+ de revenir sur le marché car cela risquerait de faire baisser significativement les prix. Le surplus d’offre sur le marché devrait se situer autour de 0,5 mb/j en 2025. Après la hausse du début d’année, liée aux sanctions américaines contre les tankers russes et à un hiver rigoureux, le prix du baril de Brent devrait refluer et passer de 77 USD/b actuellement à 70 USD/b au cours de l’année, un niveau qui semble acceptable pour la présidence américaine.

Si la politique de Trump peut influer à la hausse sur le prix du pétrole, cela se situera plus significativement sur le terrain des relations internationales et de la géopolitique. L’inclusion des hydrocarbures dans les hausses des droits de douane vis-à-vis du Canada et du Mexique (qui exportent respectivement 4 m et 0,5 m b/j à destination des raffineurs états-uniens) devrait accroître le prix des carburants pour le consommateur américain. Par ailleurs, l’application de sanctions supplémentaires sur les exportations de pétrole en provenance d’Iran et du Venezuela pousserait les prix mondiaux du brut à la hausse. A contrario, un cessez-le feu en Ukraine permettrait une levée progressive des sanctions sur le pétrole russe et agirait à la baisse sur les prix mondiaux. Cependant, si la politique de l’OPEP+ restait inchangée, l’impact en serait vraisemblablement limité. En effet, la Russie assure déjà un niveau de production qui correspond à son quota OPEP+.

Comme l’ont souligné nos collègues dans un éditorial du 21 janvier dernier sur le dollar (Trump pourrait-il faire baisser le dollar ?), les déclarations du président Trump concernant sa politique pétrolière sont pleines de contradictions : l’objectif de son administration ne correspond pas à celui des producteurs américains, tandis que les objectifs de politique intérieure (notamment faire baisser les prix pour les consommateurs) se heurtent à une politique étrangère source de pressions inflationnistes. Il faudra donc être attentif au calendrier de la politique américaine. Trop de précipitation serait à l’origine de tensions sur le marché pétrolier et alimenterait la hausse des prix. Une meilleure coordination entre les principaux producteurs (ce qui est peu probable) et entre les objectifs intérieurs et extérieurs de la politique américaine (ce qui est plus envisageable), limiterait de nombreuses sources de volatilité en 2025.

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