Alors que les salles de cinéma de l’hexagone ont battu des records de fréquentation en 2019, lumière sur le rôle joué par les Sofica dans la préservation de l’exception française, en permettant au cinéma indépendant de s’exprimer.
Le cinéma français continue à étonner par sa vitalité. Les chiffres présentés par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) pour l’année 2019 montrent que la plupart des indicateurs sont au vert. La fréquentation en salles atteint son deuxième plus haut niveau depuis 53 ans en France avec 213 millions d’entrées (+ 6 %), et un nouveau record en Europe avec 1,34 milliard de spectateurs (+4,5%). Les films conservent une part du marché domestique de 35 % en France (74 millions d’entrées) grâce à une offre particulièrement diversifiée. Mais ils se vendent également très bien à l’étranger, avec près de 40,5 millions d’entrées.
La crise sanitaire liée à l’épidémie de COVID 19 a bien sûr touché directement ce secteur, notamment avec la fermeture des salles de cinéma du 15 mars au 22 mai 2020 et l’interruption des tournages sur la durée du confinement. Ainsi si la fréquentation des salles reprend progressivement, les chiffres en 2020 seront bien entendu fortement en dessous des années précédentes. Toutefois notons la vitalité du cinéma français qui réalise en juillet et août 2020 un score supérieur à celui réalisé sur la même période en 2019. Dans le même temps, les scores d’audience du cinéma français à la télévision témoignent de l’attachement du public français et la croissance du nombre d’abonnés aux plateformes de SVOD (Netflix, Amazon Prime, Disney Plus) d’une demande toujours renouvelée pour des contenus de cinéma et de séries TV.
La France est donc une exception en Europe, et cela parce qu’elle a su préserver son industrie cinématographique, en permettant notamment aux producteurs indépendants de continuer à s’exprimer. L’un des outils de financement qui reste encore peu connu mais qui contribue largement à l’existence d’un cinéma indépendant est le statut de Société pour le Financement de l’Industrie Cinématographique et Audiovisuelle (SOFICA), créé en 1985 pour lutter contre la crise que traversait alors le cinéma en France. « Constituée de fonds privés, une Sofica investit dans la production d’œuvres cinématographiques ou audiovisuelles en contrepartie de droits à recettes sur les films », rappelle Diane Cesbron, directrice de Cinécapital qui conseille la gestion des Sofica Cinécap qui sont distribuées par BNP Paribas Banque Privée. Chaque année, une enveloppe de collecte est allouée par l’État et est répartie entre les Soficas qui ont reçu l’agrément du CNC (63,07 millions d’euros pour 11 Sofica en 2020). Pour être agréées, elles sont fortement incitées à investir dans le cinéma indépendant, avec un quota de premiers ou seconds films, et une majorité des budgets inférieurs à 8 millions d’euros.
S’agissant de films indépendants, le processus de sélection est primordial. « Notre comité d’investissement se réunit tous les mois pour étudier les projets sur la base du scénario, de la liste artistique (casting, réalisateur…) et technique (producteur, chef opérateur…) et du plan de financement, en examinant les différents scénarios d’exploitation, avec au préalable une part d’envie artistique du projet », explique Diane Cesbron. Les recettes des Sofica sont fonction du succès des films qu’elles financent car elles proviennent essentiellement des droits à recettes sur les différents supports d'exploitation (projection en salles, DVD, VOD, TV et ventes à l’étranger).
Ces succès sont difficilement prévisibles car dépendant tout autant de facteurs intrinsèques aux films (sujet traité, qualité du scénario, réalisateur, notoriété du casting, qualité de réalisation, marketing du film, prix obtenus dans les festivals, etc.) que de paramètres extérieurs (films concurrents, météo, actualités économiques, politiques, sociales, sportives…). Le risque de contre-performance est bien réel. Si l’on tient compte en plus des frais inhérents à la gestion, les Sofica ne restituent qu’une partie du capital collecté, après une immobilisation de cinq ans minimum. Ce risque a vocation à être contre-balancé par une réduction d’impôt pouvant aller jusqu'à 48 % du montant de la souscription dans la limite de 18 000 € et de 25 % du revenu net de l’investisseur.
Depuis leur création il y a 35 ans, elles ont collecté 1,8 milliard d’euros et contribuer à financer plus de 2000 longs métrages. Un film d’initiative français* sur deux bénéficie d’un apport Sofica chaque année. En 2018, elles ont participé au financement de la production de 159 œuvres cinématographiques et audiovisuelles en 2018 et 354 œuvres sont concernées par leurs conventions de développement.
* Les films dits « d’initiative française » sont les films dont le financement est majoritairement français et dont les droits sont détenus par l'entreprise de production déléguée française.
Le festival de Cannes aime les films Cinécap
A la suite de l’annulation du festival de Cannes 2020, des labels spéciaux ont été créés pour distinguer les films qui auraient dû faire partie de la sélection. Parmi eux, 6 long-métrages soutenus par Cinécap, 5 en Sélection Officielle et 1 à la Semaine de la Critique :
PASSION SIMPLE de Danielle Arbid, LES DEUX ALFRED de Bruno Podalydès, LE DISCOURS de Laurent Tirard, FREBRUARY de Kamn Kalev, UN MEDECIN DE NUIT de Elie Wajeman, LA TERRE DES HOMMES de Naël Marandin.
L’année précédente, 5 films sélectionnés par Cinécap, avaient déjà concouru dans les différentes catégories et 4 d’entre eux ont été primés :
PORTRAIT DE LA JEUNE FILLE EN FEU de Céline Sciamma, ALICE ET LE MAIRE de Nicolas Parizet, JEANNE de Bruno Dumont, UNE FILLE FACILE de Rebecca Zlotovski, LES HEROS NE MEURENT JAMAIS de Aude Léa Rapin
©Lilies Films / Image extraite du film "Portrait de la jeune fille en feu" de Céline Sciamma