La reprise, et après ?
La croissance, la véritable préoccupation plutôt que l'inflation : depuis juillet, la réaction des marchés obligataires face au taux d'inflation globale de plus de 5 % aux États-Unis (le plus élevé depuis dix ans), a été déconcertante. Plutôt que d'observer une hausse logique des rendements obligataires (les obligations reflétent la hausse des prévisions d'inflation), les rendements obligataires à long terme ont reculé par rapport aux niveaux élevés atteints fin mars. Le rendement du bon du Trésor américain à 10 ans est tombé à 1,3 % fin août, en baisse de 0,4 % par rapport à mars (plus de 1,7 %) et le rendement du Bund allemand à 10 ans a également perdu 0,3 % par rapport à son pic récent.
Un marché obligataire prudent : que nous disent donc les marchés obligataires ? Ils suggèrent que la croissance future, et non l'inflation, est désormais la principale préoccupation des marchés financiers. Un constat surprenant, compte tenu de la forte reprise économique observée des deux côtés de l'Atlantique.
Dissipation progressive de l’impact des mesures de relance liées à la pandémie : cette reprise a été alimentée par un coup de pouce anormalement important des banques centrales européenne et américaine (taux d'intérêt à zéro, programmes d'achat d'obligations) et des gouvernements (soutien au chômage, « monnaie hélicoptère », dépenses d'investissement dans les infrastructures). Cette impulsion économique devait répondre aux confinements imposés par la pandémie, de manière ponctuelle seulement.
Ralentissement de la croissance en vue ? Au fur et à mesure que nous revenons à une activité économique plus normale car post confinements (sous réserve de retombées des nouveaux variants de la COVID-19), l'impact de ce programme de relance extraordinaire va s'estomper. Les marchés obligataires nous disent aujourd'hui qu'il y a un risque substantiel de croissance économique plus faible qu’attendu à venir, post-stimulus.
Risque de resserrement prématuré de la politique monétaire : les marchés mettent également en garde contre le risque d'une erreur de politique de la Réserve fédérale américaine, qui pourrait réagir à ces taux d'inflation élevés en durcissant sa politique monétaire trop tôt, alors que la croissance ralentit déjà. Au cours des cycles passés, le relèvement des taux d'intérêt par les banques centrales, en réponse à l'augmentation des tensions inflationnistes, a été le principal déclencheur de la récession économique. Rappelons que la sensibilité de l'économie mondiale aux taux d'intérêt est aujourd'hui bien plus importante que par le passé, à cause des niveaux d'endettement très élevés. Tout resserrement, même modeste, de la politique de la Fed pourrait fortement affecter l'économie américaine et mondiale.
Les investissements ont enfin le vent en poupe : la forte croissance des investissements, tant de la part des gouvernements que des sociétés, est une nouvelle tendance qui devrait persister après une décennie de sous-investissements. à la suite de la grande crise financière, les évolutions structurelles de la demande et de la consommation après les différents confinements et le coût toujours très bas du financement par emprunt devraient pousser les entreprises à investir. Les entreprises investissent pour réduire leurs coûts et générer des gains de productivité durables, tandis que les gouvernements investissent à la fois pour soutenir l'emploi et pour moderniser les infrastructures de transport, de logement et de communication.
Privilégie les actifs réels pour générer des revenus et diversifier: dans un monde où les marchés des liquidités, des obligations souveraines et du crédit aux entreprises offrent aux investisseurs des rendements historiquement bas (voire négatifs), nous préconisons une plus grande exposition aux actifs réels avec des rendements positifs après l'inflation. L'exposition aux infrastructures, à l'immobilier et aux matières premières est une source de revenus et de diversification attractive. Les fonds de pension et d'assurance ont de plus en plus de mal à atteindre leurs objectifs de rendement, à cause de leur forte pondération historique sur les obligations et le crédit. Nous nous attendons à ce que ces investisseurs institutionnels renforcent leur exposition aux catégories d'actifs réels à l’avenir, afin de faire correspondre leur passif à long terme avec ces actifs à long terme, qui sont censés offrir des rendements futurs bien supérieurs à ceux des obligations.
Privilégier les soins de santé et les technologies médicales : les soins de santé bénéficient aujourd'hui d'une abondance d’investissements et de l’émergence de technologies révolutionnaires. Quel est le défi à relever ? C’est d’accroître le nombre d’années à vivre en bonne santé, tout en contrôlant la spirale des coûts. Les entreprises du secteur de la santé ciblent mieux les traitements grâce à des techniques de diagnostic plus précises. On peut détecter plus rapidement les problèmes de santé, l’accent étant mis sur le bien-être et la prévention. L’objectif est de faire progresser l'utilisation de la télémédecine pour fournir des soins de santé plus rapides et plus efficaces. Le nombre croissant d’autorisations de mise sur le marché de nouveaux médicaments (en particulier pour les maladies liées à l'âge ou psychiatriques telles que Alzheimer, la démence et la dépression clinique) renforce le portefeuille de médicaments des sociétés pharmaceutiques et biotechnologiques. La croissance future des bénéfices en est bien évidement favorisée.