La loi attractivité adoptée en juin dernier a assoupli les conditions d’éligibilité du Plan d’épargne en actions dédié aux petites et moyennes entreprises.
Le décret du 14 juin 2024 a simplifié les critères d’éligibilité des valeurs cotées au plan d’épargne en actions dédié aux petites et moyennes entreprises (PEA PME). Désormais, beaucoup plus de valeurs sont accessibles à ce dispositif en France et dans le reste de l’Union européenne. L’objectif? Redonner un coup de fouet à cette épargne de long terme qui vise à financer le développement des PME grâce à la Bourse.
Une clarification nécessaire
Cette simplification était demandée par les différents acteurs (entreprises cotées, banques et investisseurs spécialisés). Le président de la République l’avait appelée de ses vœux lors de la conférence annuelle d’Euronext, en mars dernier. Et elle figure dans le texte de la loi attractivité adoptée par le Parlement en juin.
Depuis la création du PEA PME il y a dix ans, l’éligibilité des entreprises à ce dispositif a toujours été complexe. À vouloir limiter tout effet d’aubaine, le texte a fondé une véritable usine à gaz qui juxtaposait des critères économiques et boursiers, laissant dans certains cas la place à des interprétations juridiques. Les sociétés de gestion françaises spécialisées dans les valeurs moyennes pouvaient faire l’effort d’analyser si une PME cotée était éligible ou pas. L’épargnant, qui investit en direct via son PEA PME, était, lui, limité à la liste fournie par Euronext sur la base déclarative des entreprises elles-mêmes. Certains le faisaient, d’autres pas. Au-delà des PME françaises, les PME éligibles du reste de l’Union européenne devaient donc se déclarer pour un dispositif fiscal qui ne concernait que les épargnants français!
Nouvelles valeurs éligibles
L’univers des actions éligibles oscillait entre 355valeurs, surtout françaises, pour l’épargnant en direct, et 2.000 sociétés européennes pour les investisseurs professionnels. Il était temps de clarifier le tout. C’est chose faite sur le seul critère quantitatif de la capitalisation boursière, et donc sans déclaration préalable nécessaire de la société cotée.
Tout l’enjeu de la simplification du dispositif est d’attirer à nouveau l’épargne vers le financement des PME via la Bourse.
Le décret élargit aussi le nombre de sociétés éligibles, puisque le critère de capitalisation boursière est rehaussé d’un à deux milliards d’euros. Les entreprises de taille intermédiaire (ETI), plus matures et plus liquides que les PME cotées, sont désormais éligibles. Nous estimons désormais le nombre de valeurs éligibles à 545 sociétés en France (avec des entreprises comme Manitou, ID Logistics, Séché Environnement, Lacroix, Beneteau ou LNA Santé) et à 3.400 sociétés dans l’Union européenne. Cet apport de nouvelles valeurs est bienvenu dans un contexte d’attrition du nombre de PME cotées à Paris depuis plusieurs années. Sur 2023 et 2024, le nombre d’offres publiques de retraits et radiations est en effet très supérieur au nombre d’introductions en Bourse.
L’enjeu de cette simplification ne se limite pas à l’épargne collectée au sein du PEA PME, dont la distribution a toujours été limitée. L’essentiel de l’épargne régie par le décret du PEA PME est en effet situé dans les organismes de placement collectifs (OPC), qui pour la grande majorité ne sont pas logés dans les PEA PME, mais au sein de contrats d’assurance vie. Jauger l’importance du PEA PME à l’aune du nombre de comptes-titres au plafond et à l’encours investi en PME cotées serait très limitatif. Le nombre d’OPC qui suivent les règles du PEA PME est estimé à environ 150 en France, pour un encours de près de 5 milliards d’euros. La création de ces fonds coïncide avec le lancement du PEA PME au milieu de la dernière décennie. La plupart voulaient bénéficier du lancement marketing du PEA PME, mais la réalité de l’épargne française les a conduits à être distribués dans les contrats d’assurance vie.
Placements de long terme
Cette épargne investie dans les PME cotées est attractive sur le long terme. Les dernières années de sous-performance par rapport aux grandes sociétés cotées, depuis la période Covid, ne doivent pas faire oublier leur qualité intrinsèque comme placement. Malgré les cycles, les crises et trois ans de performance absolue négative, incluant 2024, la performance moyenne annuelle du CAC Small, au 30 septembre 2024, est de +6,34% depuis sa création en décembre 2002, selon Euronext. La croissance des bénéfices par action y est plus forte. Les multiples de bénéfices et de valeur d’entreprise sur excédent brut d’exploitation affichent des niveaux historiquement bas par rapport à leur moyenne de long terme.
Financer des PME-ETI cotées
L’enjeu de la simplification de juin dernier est d’attirer à nouveau l’épargne vers le financement des PME via la Bourse. Plus de valeurs, c’est plus de choix, plus de performance et donc plus d’épargne. Quelques mois après cette simplification, l’impact n’est pas encore visible sur les encours des fonds concernés. Le fait de pouvoir investir sur des ETI par le rehaussement de la capitalisation boursière s’est probablement traduit dans les
premières semaines par un effet d’éviction «flight to quality» au détriment des PME cotées les moins liquides.
En parallèle, une initiative menée par CDC Croissance devrait se traduire par la mise en place d’un «fonds de fonds», dont l’objectif est d’investir 500 millions d’euros dans l’année à venir au sein des fonds spécialisés dans les small caps. Cette bonne mesure en appelle d’autres pour un fléchage nécessaire de l’épargne vers le financement de nos PME-ETI cotées. Les entrepreneurs candidats à la Bourse ne manquent pas. Le renouvellement de la cote est indispensable.
3400
C’est le nombre d’entreprises éligibles au PEA PME au sein de l’Union européenne depuis le décret du 14 juin 2024.
Publié dans "Le Revenu" le 18/11/2024