Comment la demande des philanthropes a-elle évolué durant ces dix années?
N.S. Les modalités d’actions de nos clients ont évolué. D’un simple don financier, ou legs, impliquant qu’ils recherchaient essentiellement un conseil en sélection d’organisations bénéficiaires, les philanthropes veulent aujourd’hui de plus en plus avoir une vision concrète de l’impact social de leurs actions, et s’impliquer par un engagement personnel en temps et en compétences. Leurs demandes ont ainsi évolué vers l’identification de programmes au sein d’organisations qu’ils ont souvent préalablement choisies, ou la création de leurs propres projets, avec de notre part une aide à la structuration (stratégie, utilisation de différents outils patrimoniaux comme la donation temporaire d’usufruit ou le don d’actions avant la vente d’une entreprise, évaluation de l’impact, etc.). La majorité des demandes intègre la mise en place de leur propre véhicule philanthropique (fondations et autres structures juridiques adéquates).
En quoi le digital accélère-t-il cette transformation?
N.S. Je pense que l’évolution majeure de ce début du XXIe siècle est la prise de conscience qu’il n’est pas simple de “bien donner”. Se baser sur ses valeurs et ses motivations est un bon début pour choisir son axe d’intervention. Une planification et une réflexion rigoureuses sont ensuite indispensables avant d’entreprendre une action philanthropique. Cela permet de définir sa stratégie et de spécifier ses attentes en fonction de ses motivations.
Le fait de placer l’accent sur les résultats constitue également une tendance forte. Ainsi, plutôt que de se contenter d’aider les gens en situation d’extrême pauvreté en leur donnant de l’argent ou de la nourriture, les personnes soucieuses des questions d’impact social adoptent une démarche qu'ils considèrent plus constructive en s’attaquant aux racines de la pauvreté et en construisant des passerelles permettant d’en sortir. Il existe un proverbe chinois souvent cité qui dit : « Si tu donnes un poisson à un homme, il mangera un jour. Si tu lui apprends à pêcher, il mangera toujours ».
La philanthropie va être également façonnée par la nouvelle génération hyperconnectée, les Millennials, nés entre 1980 et 2000 pour qui l’innovation, l’éthique et l’aventure font figure de maître mot. Pour eux, tout l’enjeu consiste à :
- Utiliser des outils numériques et innovants,
- Provoquer de réels changements sociaux,
- Privilégier l'investissement responsable *
- Générer un véritable impact social et environnemental sur la société en plus des rendements financiers visés.
Dans l’absolu, les Millennials sont particulièrement enclins à investir dans des FinTech (ces entreprises qui réinventent la finance à l’aide des technologies), des EdTech (celles qui utilisent la technologie en vue de favoriser l'accès à l'éducation), les domaines agricoles et alimentaires, ainsi que dans le secteur de l'énergie. L’objectif étant, dans ce cas, de permettre au plus grand nombre d’accéder à des sources d'énergie propres. Ils aspirent à jouer un véritable rôle dans les causes qu’ils défendent et les organisations qu'ils soutiennent. Comment ? En développant un entrepreneuriat social capable de générer des changements positifs dans la vie des populations du monde entier.
Contrairement à beaucoup de leurs parents, les "Next Gen" ont une approche hybride de leur action. compte tenu des constantes évolutions technologiques, leur philanthropie est bien plus globale et internationalisée que leurs prédécesseurs. Ils n’hésitent pas à s’appuyer sur les systèmes d’analyse de données pour promouvoir des objectifs environnementaux et sociaux. Par ailleurs, ils n’hésitent généralement pas à unir leurs forces. Ils peuvent ainsi être amenés à créer leurs propres réseaux afin de défendre les causes auxquelles ils croient.
Enfin, dans un monde en perpétuelle mutation, la volonté d'intervenir pour rendre le monde meilleur va dessiner de multiples voies d'approches et dessiner de nouvelles missions pour le métier de banque privée. Face à ces nouvelles demandes, nous voulons aujourd’hui pouvoir renseigner et accompagner nos clients dans l'ensemble de leur démarche. Pour cela nous développons une approche globale intégrée de solutions à impact, couvrant parallèlement des offres d’investissements responsables, d’impact investing et de philanthropie, en association avec la création de nouveaux outils digitaux (myImpact, outil en développement qui permet de définir son profil d'investisseur et de philanthrope).
Comment une banque peut-elle accompagner des philanthropes au regard de ces tendances?
N.S. La banque privée a intégré un service d’expertise en philanthropie pour apporter une réponse personnalisée au client qui souhaite mettre son patrimoine au service d'une cause utile à la société. Le conseil que nous proposons allie flexibilité, expertise et objectivité pour accompagner nos clients dans leur démarche philanthropique et trouver la solution qui répondra le mieux à leur situation et à leurs besoins.
En effet, différents outils sont à disposition pour structurer son action. La banque peut aider son client à identifier le plus approprié à sa situation patrimoniale et ses aspirations : s’engager en temps ou en compétences, signer un chèque, donner des titres, désigner une fondation bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie, effectuer un legs ou une donation temporaire d’usufruit, créer sa propre structure…
Réaliser une action au profit d’un organisme peut, selon les pays, avoir des implications fiscales et patrimoniales différentes qu’il convient de comprendre, et qui font partie intégrante du métier de banquier privé, appuyé par nos ingénieurs patrimoniaux.