Messages clés
- Les résultats des élections américaines changent la donne. L'effet sur la croissance américaine devrait être positif à court terme, mais mitigé voire négatif en 2026. Davantage de mesures de relance et de droits de douane devraient faire grimper l'inflation américaine l'année prochaine.
- Une moindre incertitude et une possible fin des conflits en Ukraine et au Moyen-Orient pourraient avoir un impact positif sur la croissance mondiale (via la baisse des prix de l'énergie et l'amélioration du sentiment) au cours des prochains mois. À moyen terme, nous pouvons toutefois nous attendre à un effet négatif dû aux droits de douane.
- La Fed devrait interrompre son cycle de baisse des taux en septembre 2025, avec un taux directeur à 3,75 %, soit deux baisses de 25 pb en moins par rapport à notre scénario précédent. Pour la BCE, nous prévoyons un taux terminal de 2 % atteint en septembre 2025 (2,25 % dans le scénario précédent).
- Nous prévoyons que le rendement américain à 10 ans pourrait s'établir à 4,25 % dans 12 mois (contre 4 % auparavant). Nous n'avons pas modifié notre objectif à 12 mois sur le rendement du Bund allemand (2,25 %). Nous passons de Positif à Neutre sur les obligations émergentes.
- Le différentiel de taux plus élevé suggère un regain de vigueur du dollar américain. Nous avons revu nos objectifs USD en général, et nos objectifs EUR/USD à 1,06 pour les 3 prochains mois et à 1,02 pour les 12 prochains mois.
- Nous avons relevé notre opinion sur les actions américaines à Positif et avons abaissé notre recommandation sur les actions européennes à Neutre. En Europe, nous continuons de privilégier le Royaume-Uni et identifions de la valeur dans les pays périphériques ainsi que dans les pays nordiques, en particulier la Suède. Nous continuons d'apprécier les valeurs cycliques, avec une exposition domestique.
- Les valeurs financières sont notre secteur clé de conviction aux États-Unis.
- Nous restons Neutre sur le prix du Brent, avec une fourchette cible de 70 à 80 dollars. Cependant, les risques baissiers augmentent.
Perspectives économiques : les résultats des élections américaines changent la donne. Comme nous l'avons indiqué dans notre Flash après les élections américaines, les effets sur la croissance américaine devraient être positifs au cours des prochains trimestres, mais mitigés à négatifs en 2026. L'hypothèse clé est que l'augmentation des mesures de relance et des droits de douane devrait faire grimper l'inflation, l'économie restant proche du plein emploi. Nous attendons des hausses tarifaires de la part du président américain, mais nous partons du principe qu'elles seront inférieures aux attentes, car ces menaces seront également utilisées comme technique de négociation. Nous allons probablement revoir à la baisse la croissance européenne, mais seulement légèrement. Nous ne prévoyons que peu d'impact sur les prévisions d'inflation, qui pourraient même être encore plus faibles. Il en va de même pour la plupart des autres pays.
Les risques de récession dans la zone euro restent faibles dans la mesure où la tendance sous-jacente reste favorable, notamment la consommation. Les perspectives de revenus restent positives, d'autant plus que les incertitudes relatives à l'inflation et au pouvoir d'achat se sont dissipées. Notons également que de nombreuses nouvelles négatives ont déjà été intégrées dans les cours et que les statistiques économiques ont généralement surpris de manière positive, même dans la zone euro. Nous avons également observé des signaux positifs de la dynamique du crédit dans l'enquête de la BCE sur les prêts.
En Chine, le marché a été déçu, l'annonce budgétaire faite après le Congrès national du peuple (NPC) n'ayant pas répondu aux attentes, sans parler de soutien budgétaire à la consommation ou au marché immobilier. Les marchés s'inquiètent également des droits de douane potentiels aux États-Unis et du durcissement de la position de Donald Trump à l'égard de la Chine, qui devrait nommer Mike Waltz comme conseiller en matière de sécurité nationale. Il reste toutefois une marge de manœuvre pour davantage de mesures de relance budgétaire.
Une moindre incertitude et une possible fin des conflits en Ukraine et au Moyen-Orient pourraient avoir un impact positif sur la croissance mondiale (via la baisse des prix de l'énergie et l'amélioration du sentiment) au cours des prochains mois. À moyen terme, nous pouvons toutefois nous attendre à un effet négatif dû aux droits de douane. Guy Ertz
Banques centrales et marchés obligataires
L'impact de l'élection américaine est que la Fed pourrait interrompre le cycle de baisse des taux plus tôt que prévu, l'inflation pouvant augmenter fin 2025. Pour l'instant, la Fed ne modifiera pas son plan, car elle prend ses décisions en fonctions des données économiques et ne spécule pas sur l'impact des actions du nouveau président. Ainsi, le plan de baisse des taux directeurs en décembre et à un rythme trimestriel sur la majeure partie de l'année 2025 reste selon nous valable. Nous pensons que la Fed arrêtera son cycle de baisse en septembre 2025 avec un taux directeur de 3,75 %, soit deux baisses de 25 pb en moins par rapport à notre scénario précédent.
Dans la zone euro, la désinflation est bien engagée et la croissance économique ralentit. La probabilité d’avoir plus de baisses de taux directeurs est donc plus élevée. Nous tablons désormais sur un taux terminal de 2 % qui devrait être atteint en septembre 2025, contre 2,25 % dans le scénario précédent.
Nous avons revu à la hausse nos objectifs de rendements obligataires aux États-Unis compte tenu du risque d'inflation (la politique de Donald Trump se concentre sur moins d'immigration et plus de droits de douane) et du risque d'augmentation des dépenses budgétaires qui suggérerait une augmentation de l'offre de bons du Trésor. Le rendement à 10 ans américain pourrait s’établir à 4,25 % dans 12 mois (contre 4 % auparavant). Nous n'avons pas modifié notre objectif à 12 mois sur le rendement du Bund allemand (2,25 %). Nous restons Neutre sur les emprunts d'État.
En ce qui concerne les obligations d'entreprises, la vague rouge constitue le scénario parfait pour le crédit, car il implique moins de réglementations et une baisse de l'impôt sur les sociétés. Les obligations d'entreprises pourraient tester de nouveaux points bas du cycle aux États-Unis. En Europe, la vague rouge n'est pas positive pour le crédit compte tenu des droits de douane potentiels et des incertitudes géopolitiques. Toutefois, nous pensons que ces risques sont déjà intégrés dans les cours en bonne partie, et nous ne croyons pas que Donald Trump impose autant de droits de douane que ce qui est annoncé. Le contexte technique reste très favorable, et nous restons Positif sur les obligations d'entreprises investment grade en EUR et en USD, et Neutre sur les obligations d'entreprises à haut rendement (les valorisations sont très serrées).
Sur les marchés émergents, les fondamentaux sont solides et le portage élevé. Toutefois, la politique budgétaire américaine expansionniste attendue devrait générer des rendements obligataires américains plus élevés et la divergence des politiques des banques centrales suggère un renchérissement du dollar. Ces deux facteurs ne sont pas favorables aux obligations émergentes. En outre, les droits de douane et les tensions commerciales potentielles nuiront aux exportateurs des pays émergents. Par conséquent, nous passons de Positif à Neutre sur les obligations émergentes. Edouard Desbonnets
Devises
Le principal moteur du mois à venir sera le différentiel de taux d'intérêt. Comme indiqué plus haut, le taux directeur de la Réserve fédérale américaine devrait désormais se stabiliser à un niveau supérieur à nos prévisions précédentes. En outre, la BCE devrait probablement réduire ses taux plus que prévu. Cela impliquerait un écart de taux beaucoup plus élevé en faveur de l'USD par rapport à l'euro. Nous avons donc revu à la baisse notre objectif EUR/USD a 1,06 pour les 3 prochains mois et 1,02 pour les 12 prochains mois. Cela suggère un raffermissement du dollar. L'euro reste toutefois sous-évalué par rapport aux estimations de juste valeur à long terme, telles que celles de l'OCDE, mais les écarts peuvent persister au fil du temps, en particulier lorsque l'écart de taux d'intérêt augmente.
Nous avons également modifié nos perspectives pour le yen japonais. La Banque du Japon devrait encore relever son taux directeur. Néanmoins, comme mentionné ci-dessus, le taux de fin de cycle de la Fed est désormais considéré comme supérieur à nos prévisions précédentes. Le yen devrait rester globalement stable aux alentours des niveaux actuels. Nous avons révisé notre objectif USD/JPY à 150 (valeur d'un USD) pour les horizons 3 et 12 mois. La devise chinoise subit davantage de pertes par rapport aux niveaux actuels. Nous avons révisé nos objectifs USD/CNY à 7,20 et 7,30 (valeur d'un dollar) pour les horizons 3 et 12 mois. Nous avons également revu d'autres objectifs par rapport à l'USD. Vous trouverez plus de détails dans notre Focus sur les devises qui sera publié prochainement. Guy Ertz
Actions
Nous passons de Positif à Neutre sur les actions européennes. Les perspectives de l'Europe se sont récemment fortement dégradées. Non seulement la menace d'une recrudescence des tensions commerciales mondiales compromet notre vision d'une reprise de la croissance, mais elle le fait aussi probablement au pire moment. Avec l'effondrement de la coalition dirigeante allemande, le pays clé de la zone euro sera focalisé sur les questions domestiques dans les prochains mois. Cela rend une réponse européenne coordonnée à toute demande américaine plus compliquée. En raison de sa structure commerciale ouverte et tournée vers l'exportation, l'Europe souffrirait également de l'escalade des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine.
Bien que notre scénario de base ne présuppose ni un taux de droit global de 10 % ni un droit de douane de 60 % sur la Chine, le simple fait de menacer de la sorte pourrait créer de graves craintes sur la croissance, dans la mesure où l'incertitude entrave généralement les investissements. Les bénéfices publiés par les entreprises européennes ont été jusqu'à présent mitigés. Si les bénéfices pondérés par la capitalisation boursière flottante ont dépassé le consensus de 3,7 %, l'ampleur des révisions de bénéfices reste négative (mesure des révisions par les analystes à la hausse moins les révisions à la baisse). Les bénéfices semblent globalement négatifs, avec des révisions significatives, mais l'impact est particulièrement important pour les secteurs liés à la Chine, tels que les constructeurs automobiles, le luxe et les producteurs de matières premières. Ceci est d'autant plus important qu'il met en péril la croissance attendue des bénéfices pour 2025, d'autant plus qu'une réduction de 0,1 point du PIB pondéré par les ventes pourrait entraîner une baisse des bénéfices du STOXX 600 de 1 point. En Europe, nous privilégions le Royaume-Uni et identifions de la valeur dans les pays périphériques ainsi que dans les pays nordiques, en particulier en Suède.
Nous passons de Neutre à Positif sur les actions américaines. Après la vague rouge, nous devrions assister à la mise en œuvre de nombreux (voire tous) plans de relance budgétaire évoqués, y compris des réductions d'impôts et une déréglementation. Il convient de garder à l'esprit que ce sont les petites et moyennes capitalisations qui devraient le plus bénéficier des mesures de baisses d’impôt car, entre autres facteurs, leur taux d'imposition effectif est actuellement supérieur à celui des grandes capitalisations. Si nous combinons cela avec une politique principalement axée sur l'économie domestique, nous voyons les planètes s'aligner pour un changement plus durable des méga-caps américaines, encore relativement chères, en faveur des segments du marché plus raisonnablement valorisés. Nous maintenons ainsi notre préférence relative pour les petites et moyennes capitalisations par rapport au S&P500 équipondéré et, notre préférence relative pour le S&P500 équipondéré par rapport au S&P500 pondéré par le marché. Dans la mesure où la politique susmentionnée devrait également contribuer à la hausse des indices PMI manufacturiers, nous continuons d'apprécier les valeurs cycliques exposées aux marchés domestiques. Au niveau sectoriel nous préférons les financières aux États-Unis, car le secteur devrait bénéficier d'un environnement de taux « plus élevés pour plus longtemps » et de la poursuite de la déréglementation. Stephan Kemper
Nous restons prudemment optimistes à l'égard des actions chinoises pour trois raisons :
1) Il reste encore de la marge pour davantage de mesures de relance budgétaire. Il est probable que Pékin préférera introduire de nouvelles mesures de relance dans le budget 2025 après l'investiture de Donald Trump
2) Un droit de douane de 60 % sur la Chine n'est pas notre scénario de base. Tout comme lors de la guerre commerciale 1.0, il peut s’agir d’une tactique commerciale de Donald Trump pour obtenir un accord (et cela pourrait peut-être prendre moins de temps que lors de la guerre commerciale de 2.0)
3) À court terme, le marché chinois pourrait rester volatil, mais nous pensons que les actions domestiques A (c'est-à-dire l'indice CSI 300) seront plus résilientes que les actions chinoises offshore en raison de la réforme en cours des marchés de capitaux. En outre, la facilité de swap issue du plan de relance annoncé en septembre a bien fonctionné pour améliorer la liquidité du marché et encourager les entrées de capitaux sur les marchés des actions A. Grace Tam
Matières premières
Le président élu Trump a promis de soutenir l'exploration pétrolière et gazière américaine (y compris le pétrole et le gaz de schiste), en repoussant la réglementation et en accélérant les procédures d'octroi de permis. Cela augmentera encore la production de pétrole et de gaz déjà record du pays. Si cela offre des perspectives de croissance des volumes positives pour les entreprises énergétiques américaines, cela pourrait toutefois entraîner une pression supplémentaire sur les prix du pétrole dans une situation d'offre et de demande déjà difficile. Il faut garder à l’esprit que la croissance de la demande mondiale reste très lente, en partie en raison de la transition énergétique. Cette perspective d'une nouvelle augmentation de l'offre américaine vient s'ajouter à l'intention de l'OPEP d'augmenter progressivement sa production à nouveau. Ces dernières années, l'OPEP + avait réduit sa production de 5,8 millions de barils par jour (soit +/-10 % de sa capacité) pour soutenir les prix. Cette réduction a cependant été compensée par l'offre croissante des pays non-membres de l'OPEP, principalement en Amérique. L'OPEP + n'est pas disposée à prolonger ad vitam aeternam ses réductions de production, car elle souhaite récupérer des parts de marché.
Le début du processus de réduction prévu a déjà été reporté d'octobre 2024 à janvier 2025 en raison des tensions récentes sur les prix du pétrole. Lors de leur prochaine réunion le 1ᵉʳ décembre, l'OPEP + pourrait encore décider de nouvelles extensions ou du rythme de réduction de la production. Une prolongation complète jusqu'à la fin 2025 est peu probable. Une réduction très progressive de la production, associée à une plus grande discipline de la part de certains membres, pourrait constituer un résultat réalisable pour le marché pétrolier.
Avant cette réunion cruciale de l'OPEP+, nous restons Neutre sur le prix du Brent avec un objectif de 70-80 dollars. Cependant, les risques baissiers augmentent, notamment dans le cas où l'OPEP + augmenterait sa production trop rapidement ou ne parviendrait pas à un accord convaincant (ou manquerait de discipline). Bien que le plan de relance chinois puisse soutenir la consommation de pétrole en Chine l'année prochaine, nous anticipons une croissance limitée de la demande mondiale au cours des prochaines années en raison de la transition énergétique. Il subsiste un risque haussier en cas de nouvelle escalade du conflit israélo-palestinien. Patrick Casselman
Cet article a été réalisé par BNP Paribas Wealth Management.