Un retour à la normale progressif
Les campagnes de vaccination devraient permettre de remettre l’économie sur le bon chemin, mais ce dernier s’annonce long, comme le souligne Alain Papiasse, Chairman de BNP Paribas CIB, qui en dresse les perspectives et les risques.
À quelle échéance voyez-vous le retour à une situation économique normale ?
Même si nous avons dû faire face à une deuxième vague, son impact économique a été moindre qu’au 2e trimestre 2020 car les mesures de restriction ont été plus légères et les entreprises se sont adaptées à une nouvelle façon de travailler. Les campagnes de vaccination vont poser les bases d’un retour à la normale qui ne devrait intervenir qu’à l’été 2021. La faiblesse des taux d’intérêts, les injections de liquidités de la part des banques centrales et les politiques de relance mises en place dans de nombreux pays devraient contribuer à la reprise économique. Après successivement des scénarios de reprise en V, en U et en W, beaucoup penchent dorénavant pour un scénario en K.
En quoi consiste exactement un scénario en K ?
Ce scénario est tiré d’un certain nombre d’études qui montrent que certains secteurs - la branche montante du K - vont bénéficier de la crise sanitaire mondiale (comme les entreprises travaillant sur les solutions digitales, les réseaux, la vente en ligne…) alors que d’autres - la branche descendante - vont en pâtir (à l’instar du tourisme, du transport aérien, de l’aéronautique, de la distribution de produits non alimentaires…). Il ne s’agit pas simplement d’un à-coup dû à la crise car certains secteurs devraient souffrir d’une remise en cause de leur business model. Le transport aérien ne reviendra sans doute à son niveau d’activité d’avant crise qu’à partir de 2025 seulement. Il en va de même pour la distribution traditionnelle qui ne pourra pas reprendre.
Après successivement des scénarios en V, en U et en W, beaucoup penchent dorénavant pour un scénario en K.
Quels sont les risques potentiels pour les investisseurs ?
Le principal risque pour les investisseurs est une dichotomie entre économie réelle et marchés financiers. La faiblesse des taux bas pousse les investisseurs institutionnels à rechercher d’autres alternatives. C’est pourquoi il faut être vigilant aux effets de bulle et être sélectif, surtout si le scénario de reprise en K se concrétise. En outre, si l’accroissement de l’endettement public et privé est incontournable pour faire face à l’ampleur de la crise économique actuelle, sa réduction doit être à un moment sérieusement envisagée, car il obère la marge de manoeuvre tant des États que des entreprises sur le long terme.
Entré au Crédit Lyonnais en 1973, Alain Papiasse y occupe différents postes avant d’en être nommé vice-président exécutif pour les Amériques en 1996, puis directeur général délégué en 2002. Il rejoint BNP Paribas en 2005 en tant que membre du Comité Exécutif et responsable d’Investment Solutions puis de Corporate and Investment Banking (CIB) en 2009. Il en est le Chairman depuis 2018.
Article extrait de la lettre gestion de fortune n°29 du mois de janvier 2021